A la suite de l'article intitulé « Alexander Boris de Pfeffel Johnson a la langue bien pendue », que nous avons publié le 24 juillet, voici encore un article sur l'élection de Boris Johnson comme Premier Ministre de la Grande Bretagne, et voici encore une belle traduction par notre linguiste du mois de septembre 2017, Valérie François, a partir d'une annonce imaginaire de l'humoriste américain, Andy Borowitz, dans sa rubrique sur le New Yorker.
Boris Johnson
Elizabeth II
Valérie François
Andy Borowitz
LONDRES (Rapport Borowitz) - La Reine Elizabeth II déménage « immédiatement » au Canada et devrait y résider à plein temps d’ici la fin de la semaine, a confirmé mardi le Buckingham Palace.
La reine n’a donné aucune raison pour ce déménagement, mais le palais a indiqué qu’elle faisait ses valises depuis plusieurs semaines.
Signe que la décision de la reine est irrévocable, le palais a révélé que ses corgis bien-aimés avaient déjà été transportés par avion à Toronto.
Dans une brève déclaration d’adieux au peuple britannique, la reine a expliqué pourquoi elle avait choisi le Canada comme nouvelle patrie. « Nous parlons la même langue et notre portrait apparait sur leur monnaie », a-t-elle déclaré.
Elle a affirmé qu’elle n’avait « aucun regret » à abdiquer le trône en faveur de son fils, Charles. « À ce stade, il n’y a rien qu’il puisse faire qui rendra le Royaume-Uni encore plus chaotique qu’il ne l’est déjà », a-t-elle déclaré.
The Oxford English Dictionary: gab (noun): "b. the gift of the gab: a talent for speaking, fluency of speech. (Sc. also gift of the GOB.)" In the U.S., the phrase most often heard is "the gift of gab." As a verb, gab means to chatter, prattle, talk.
glib (adjective). Of a speaker or writer, of the tongue, etc. 'Well-oiled', ready and fluent in utterance. Of language: Characterized by fluency and readiness. Chiefly in contemptuous use, implying lack of thought or of sincerity."
Le texte ci-dessous a été traduit par notre fidèle contributrice, Valérie François, à partir d'un article de l'agence Reuters
LONDRES (Reuters) - JULY 23, 2019
Le Premier ministre désigné du Royaume-Uni s’est un jour vanté de pouvoir réciter par cœur les cent premières lignes de l’Iliade d’Homère en grec ancien. [Note du blog : En bas de cet article, Johnson chante la Marseillaise.]
Depuis longtemps, Boris Johnson tisse de l’or en politique grâce à son langage grandiloquent en utilisant ce que certains linguistes et observateurs considèrent comme un langage pompeux, un vocabulaire ésotérique, une crudité occasionnelle et des épisodes de fanfaronnades maladroites.
Il confectionne ce qui semble être un discours spontané ponctué de références allant de l’antiquité classique à la culture britannique populaire, et courtise la controverse pour accroître sa popularité en utilisant parfois ce qui est maintenant considéré comme des anachronismes impériaux britanniques.
« Le langage utilisé par Johnson est souvent un mélange de métaphores ou de tournures de phrase inattendues, d’hyperboles et de nostalgie, le plus souvent avec une touche toute britannique », a déclaré Philip Seargeant, maître de conférences en linguistique appliquée à l’Open University.
Sa prestation est importante, également, a déclaré Seargeant « parce que cela agrémente le phrasé héroï-comique d’une dose de fanfaronnade maîtrisée, qui instille un sens du comique à toute chose. »
Le trop plein d’audace de la flamboyance verbale de Johnson est depuis longtemps l’une de ses marques de fabrique, depuis les clubs de débat de son prestigieux lycée privé Eton College, en passant par l’Université d’Oxford et jusqu’à ses débuts de journaliste correspondant à Bruxelles où il raillait le projet européen.
En tant que politicien, il a perfectionné son art oratoire de la séduction en tant que célébrité d’émissions de télévision et maire de Londres. Il a régulièrement éclipsé les dirigeants du Parti conservateur avec des discours prononcés lors de la conférence annuelle du Parti, lesquels ont ravi de nombreux membres citoyens.
Il est l’auteur d’ouvrages, notamment une biographie de son héros et chef de guerre britannique Winston Churchill. Il a reçu 22 917 livres (28 524,79 dollars) par mois pour sa chronique hebdomadaire dans le quotidien Telegraph.
Derrière les acrobaties verbales, cependant, les linguistes perçoivent une utilisation du langage beaucoup plus calculatrice.
« Sur la scène publique, il arbore à tout le moins les masques suivants : celui d’orateur entraînant, de causeur affable et d’amateur empoté », a déclaré Paul Chilton, professeur émérite de linguistique à l’Université de Lancaster.
« Il sait que pour séduire une audience il faut faire rire, ce qui dissimule le manque de mesures politiques, l’absence d’engagement, les demi-vérités, les mensonges et l’ignorance des faits. Tout cela devient inutile dans l’art du spectacle » a déclaré Chilton.
Johnson, 55 ans, va devenir le prochain Premier ministre britannique après son élection à la tête du Parti conservateur, le mardi 23 juillet.
Il a déclaré que son expérience en tant que maire de Londres et plus tard en tant que ministre des Affaires étrangères démontrait qu’il avait une bonne maîtrise de la politique et que les accusations de mensonge étaient dues à des citations sorties de leur contexte.
Les analogies exagérées qu’il emploie peuvent provoquer de forts ressentiments.
Il a lancé que l’accord raté de la Première ministre Theresa May dirigeait la Grande-Bretagne vers un « statut de colonie ». Lors de la campagne du référendum britannique sur le Brexit de 2016, il a averti qu’en tentant de créer un super-État européen, l’Union européenne suivait le chemin d’Adolf Hitler et de Napoléon.
Johnson a proposé un « Brexit complet » plutôt qu’un « Brexit en rouleau de papier toilette », en référence à l’aspect « doux, fragile et infiniment long » du produit.
Il a également suggéré un jour que le président des États-Unis, Barack Obama, qu’il qualifiait de « moitié kenyan », nourrissait une aversion ancestrale envers l’Empire britannique. En outre, il a écrit un limerick obscène au sujet du président turc Tayyip Erdogan.
En 2016, alors qu’il était ministre britannique des Affaires étrangères, Johnson a déclaré qu’il lui faudrait beaucoup trop de temps pour s’excuser du « riche thésaurus » de propos désobligeants qu’il a tenus au fil des ans au sujet des dirigeants du monde et qui ont été « mal interprétés ».
ATHÈNES ET ROME
Peu de politiciens modernes affichent autant leur admiration pour la Grèce antique que le prochain Premier ministre britannique. Alexander Boris de Pfeffel Johnson, de son vrai nom, est communément appelé simplement « Boris ».
Ayant étudié les lettres classiques à l’université, Johnson maîtrise le latin et le grec ancien.
Dans un entretien récent avec talkRADIO, il a dévoilé, dans les mêmes minutes, son hobby qui consiste à fabriquer des maquettes de bus londoniens à partir de caisses en bois et qu’il était un admirateur de Périclès d’Athènes, célèbre homme d’État grec et orateur du Ve siècle avant notre ère.
« Son recours occasionnel aux langues classiques sert plusieurs objectifs, c’est une façon de revendiquer une certaine autorité », a déclaré Chilton, qui a également souligné le penchant de Johnson pour les techniques oratoires classiques.
Dans un discours prononcé la semaine dernière aux membres du parti au cours de sa campagne pour la présidence du parti, Johnson a brandi un hareng fumé sous vide et a tenté de ridiculiser la réglementation de l’Union européenne en soulignant l’absurdité d’imposer un tel emballage pour la congélation.
La législation de l’UE n’exige pas un tel emballage. Les partisans de Johnson ont déclaré qu’il utilisait le poisson comme une illustration.
« La ruse du hareng fumé à la campagne électorale du Parti conservateur est en réalité un stratagème antique de rhétorique politique. Caton l’Ancien aurait apporté une grappe de raisin carthaginois frais au Sénat romain pour faire valoir son point de vue politique », a déclaré Chilton.